Vision d’avenir
Il est minuit, le sommeil vous gagne. Vous vous arrachez péniblement au canapé, vous traînez dans la douche puis rampez jusqu’à votre lit. Aaaah. Vous êtes prête à plonger pieds joints dans un sommeil béat lorsque vous sentez deux petits pieds froids contre votre jambe. C’est Monette qui, trouvant le temps long, a déménagé avec son duvet, son nounours, ses livres et ses poupées. Tout ce petit monde est donc confortablement installé dans VOTRE lit.
Vous rassemblez encore quelque énergie afin de protester contre cette invasion barbare et obtenez de haute lutte que les poupées dorment par terre – tortionnaire que vous êtes. Vous pensez avoir enfin mérité un dodo réparateur, en souhaitez autant à votre puce et vous tournez sur le côté. Hélas, vous n’êtes pas au bout de vos peines, car une petite voix flûtée perce l’obscurité :
« Tu sais, maman, j’ai beaucoup réfléchi ».
« C’est bien », marmonnez-vous pour la forme avant de plonger la tête sous l’oreiller.
« Quand je me marierai, moi, je ne choisirai pas n’importe qui ».
Vous résistez à l’envie de commenter le sous-entendu. D’ailleurs, point besoin de répondant, votre chipie est lancée.
« Non, moi, je prendrai mes maris (vous notez le pluriel au passage), à l’essai. D’abord. Je veux voir s’ils sont gentils avant de les épouser. Par exemple, ils doivent m’aider à faire la cuisine, la vaisselle, les courses, la lessive et le ménage. Et me laisser tranquille quand je lis, quand je prends mon café, mon bain, ou quand je regarde le journal télévisé. »
Pause. « Et s’ils ne font pas tout ça, je leur dirai : hors de ma maison ! Et j’essaierai avec le suivant ».
Encouragez-vous : il vous reste à peine quelques années de sommeil tranquille avant de voir poindre cette longue file de soupirants.